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Réflexions


Entretien professionnel annuel en lieu et place de la note chiffrée

vendredi 4 février 2011

Tous les médias parlent d’une petite "révolution culturelle"(expresso du café pédagogique du 3 février) dans le monde de la fonction publique. En effet, le dossier de la notation de tous les fonctionnaires d’Etat, dispositif mis en place depuis 1946, devra obligatoirement évoluer à partir de 2012 au profit d’un entretien d’évaluation annuel. Pour résumer brièvement, il s’agira sous peu de proposer aux fonctionnaires une évaluation écrite faisant suite à un entretien professionnel. Cette évaluation ne sera donc plus chiffrée selon le décret paru le 5 août 2010 au Journal Officiel.

Ce changement radical du système d’évaluation professionnelle des fonctionnaires permettra de mesurer les "résultats" des agents au regard "d’objectifs" préalablement assignés (entretien annuel précédent par exemple).

Il faut savoir que depuis 2007, l’Etat expérimente dans certains secteurs (volontaires) de la fonction publique ce système d’appréciation professionnelle. Un récent un bilan rendu public il y a quelques jours seulement, tente à démontrer que ce système serait "plus juste et plus rigoureux" que notre actuel système de notation.

Le secrétaire d’Etat à la fonction publique Georges Tron affirme que « l’on gagnera en latitude pour attribuer les coups de pouce ». Le décret d’août 2010 prévoit qu’« il est réparti annuellement un ou plusieurs mois de réduction d’ancienneté pour accéder à l’échelon supérieur » ; cela signifie que suite à un bon compte-rendu, un fonctionnaire continuera toujours à progresser plus vite que ses collègues. L’administration bénéficiera d’un quota de 90 mois pour un effectif de 100 agents.

Règle de fonctionnement à venir : il n’est possible d’attribuer chaque année au même fonctionnaire pas plus de trois mois de réduction ou de majoration d’ancienneté.

Pourquoi réformer ?

Officiellement, le système est jugé "infantilisant", aboutit à une harmonisation par le haut des notes données aux agents. Un rapport de février 2007 du comité d’enquête sur le coût et le rendement des services public, rattaché à la Cour des comptes, indiquait que "les dispositifs de notation avaient pour ambition de comparer les agents entre eux". "Cet objectif a peu à peu été vidé de son sens avec l’alignement systématique vers le maximum de l’ensemble des notes".

Officiellement encore une fois, ne nous leurrons pas, ce changement contribue à rapprocher les méthodes de gestion des ressources humaines de la fonction publique de celles du privé. Les fonctionnaires seront-ils gagnants ou perdants ?

Gardons à l’esprit que le projet de modernisation implique que l’évaluation ait une conséquence sur la rémunération, au travers de la « Prime de Fonctions et de Résultats » (PFR) - mise en place en 2010. Il est actuellement prévu qu’elle soit composée de deux parties. La première, fixe, représente 60% de la prime, est appelée « prime de fonction ». Elle doit être définie par chaque ministère de façon pérenne, suivant l’emploi, le niveau de responsabilité, la qualification et l’ancienneté de l’agent. La partie variable, représentant 40%, est le montant de la prime fixée en fonction de l’atteinte des résultats constatés durant l’entretien professionnel. L’objectif est de généraliser la PFR d’ici 2012 aux trois fonctions publiques (Etat, Hospitalière et Territoriale). Ce dispositif doit permettre de « mieux prendre en compte la performance et la manière de servir de l’agent dans l’attribution indemnitaire afin de motiver les agents, et de favoriser la mise en place dans l’administration d’un management par objectifs ».

Nous comprenons mieux la forte pression (on nous l’a imposé sans concertation) de passer au nouveau modèle de projet d’école (avec les objectifs chiffrés...), aux fameux contrats d’objectifs des circos (encore des chiffres) et une affirmation donnée par l’IA du Lot prend tout son sens : l’objectif est de baisser de 30% par an les difficultés scolaires des élèves (encore et toujours des chiffres et des statistiques). Au delà de l’arrivée d’objectifs chiffrés, la volonté de la fonction publique est de conforter les IEN dans un rôle de manager de proximité et d’accroître ses responsabilités pour nous faire travailler autrement.

L’entretien professionnel a pour but de développer la culture du résultat auprès des fonctionnaires. Mais cette culture du résultat provoquera l’amplification d’un phénomène nouveau depuis 2007 : l’individualisation (projet politique bien ficelé) !

Des documents internes qui circulent entre les ministères confirment le souhait de faire évoluer l’école via un management par objectifs pour imposer le passage d’une logique de moyens à une logique de performance et de résultats. Des remontées ministérielles officielles indiquent que malgré les formations, les managers n’aient pas encore acquis les outils et les techniques nécessaires à la bonne marche du dispositif, et redoutent la subjectivité que suppose l’outil.

Questions à se poser collectivement

Cet entretien professionnel tant inspiré du privé est-il réellement transposable au public ? Ne sera-t-il pas contre-productif comme le craignent beaucoup d’agents ? Dans les faits, voici comment se déroule un entretien professionnel dans le secteur Education Nationale de la Fonction Publique (pour les non-enseignants) :

Entretien professionnel et avancement des personnels

La note est enfin supprimée. Mais les avancements d’échelon et de grade restent liés à l’entretien professionnel. Le Sgen-CFDT ne peut s’en satisfaire.

Entretien professionnel Il se tient chaque année et donne lieu à un compte rendu. L’entretien professionnel est conduit par le supérieur hiérarchique direct du fonctionnaire (l’IEN pour les enseignants du 1er degré). Il porte principalement sur :

-  1. Les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire

-  2. Les objectifs assignés au fonctionnaire pour l’année à venir

-  3. La manière de servir du fonctionnaire

-  4. Les acquis de son expérience professionnelle

-  5. Les besoins de formation du fonctionnaire

-  6. Ses perspectives d’évolution professionnelle.

L’entretien professionnel est complété par l’entretien de formation. L’agent est alors informé du niveau des droits acquis en matière de droit individuel à la formation.

Le supérieur hiérarchique direct établit et signe le compte-rendu de l’entretien professionnel qui comporte une appréciation générale exprimant la valeur professionnelle de l’agent. Le compte rendu lui est communiqué. Il le signe après l’avoir, le cas échéant, complété par ses observations sur la conduite de l’entretien ou les différents sujets sur lesquels il porte. Il le retourne à son supérieur hiérarchique qui le verse à son dossier. L’arrêté comporte en annexe une liste de critères d’appréciation de la valeur professionnelle des agents répartis en quatre rubriques : compétences professionnelles et technicité, contribution à l’activité du service, qualités personnelles et relationnelles et, le cas échéant, aptitude au management et à la conduite de projet.

Recours Dans un délai de dix jours à compter de la communication à l’agent du compte rendu, celui-ci peut demander à son supérieur hiérarchique de le modifier. Le supérieur doit répondre dans les dix jours suivants la demande. Si l’agent n’obtient pas satisfaction, il peut saisir la commission administrative paritaire (CAP) compétente. Il dispose d’un délai maximum de 10 jours à compter de la réponse du supérieur hiérarchique. La CAP doit disposer de tous les éléments utiles d’information. Elle peut alors demander au supérieur hiérarchique de réviser le compte-rendu de l’entretien.

Avancement Pour l’avancement d’échelon, au moins 30 % des bénéficiaires doivent avoir deux ou trois mois de bonification. Le reste est laissé à la discrétion des chefs de services (recteur, bureaux ministériels de gestion) après consultation des CAP compétentes, compte tenu des propositions des supérieurs hiérarchiques directs des agents. Le tableau d’avancement au grade supérieur est établi notamment à partir des comptes-rendus d’entretien professionnel, des propositions motivées formulées par les chefs de service et des notations établies jusqu’en 2007. L’avis du Sgen-CFDT : Le Sgen-CFDT relève quelques rares points positifs :

-  La suppression de la note chiffrée que nous réclamions depuis longtemps

-  Le retour à un rythme annuel des bonifications d’ancienneté d’échelon

-  Le maintien de critères communs à tous les personnels

-  L’assouplissement des quotas d’avancement

Mais nous pensons que ce projet continue de souffrir d’une carence fondamentale : il maintient le lien entre entretien professionnel et avancement d’échelon. Le Sgen-CFDT considère que ce lien conduit, à la fois, à une mauvaise évaluation et à un mauvais avancement. Il faut en finir avec « l’évaluation sanction » et faire de l’entretien professionnel un facteur de progrès, tant pour le fonctionnaire que pour le service public. Tant que l’entretien professionnel se réduira à une préparation de l’avancement, aucun progrès ne pourra être réalisé dans la gestion des ressources humaines dans les écoles, établissements et services.

Pour le Sgen-CFDT, l’entretien professionnel doit servir à analyser le fonctionnement du service pour le faire évoluer, faire apparaître les besoins en formation des personnels, préparer les évolutions de carrière. Une réflexion sur le déroulement des carrières devient indispensable au sein des ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

Nous resterons très vigilants par rapport à la logique de “management”... car Ce virage nous inquiète fortement à la lecture de certains projets politiques !


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